5ᵉ République au Togo : un pouvoir sans partage pour Faure Gnassingbé

Le passage du Togo à un régime parlementaire consacre Faure Gnassingbé comme détenteur des pleins pouvoirs exécutifs, reléguant le président de la République à un rôle symbolique. Une transition institutionnelle vivement critiquée par l’opposition.

Le 3 mai 2025 à Lomé, les parlementaires togolais ont bouclé la mise en place des institutions de la 5ᵉ République, issue de la nouvelle constitution adoptée le 6 mai 2024. Cette réforme majeure fait passer le Togo d’un régime présidentiel à un régime parlementaire, redistribuant les rôles au sommet de l’État.

Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005, a été élu président du Conseil des ministres par les députés. Ce poste, qui remplace celui de Premier ministre, concentre désormais l’essentiel du pouvoir exécutif. Moins de deux heures après sa désignation, il a prêté serment devant la Cour constitutionnelle pour un mandat de six ans renouvelable. Il devrait annoncer prochainement la composition de son premier gouvernement sous ce nouveau régime. L’armée, elle, a déjà fait allégeance au nouveau chef du gouvernement.

Dans la foulée, le congrès (réunissant députés et sénateurs) a élu Jean Lucien Savi de Tové, 86 ans, président de la République. Ancien ministre, issu de l’ethnie Ewe et opposant historique, il était le seul candidat en lice proposé par le parti au pouvoir, l’Union pour la République (UNIR). Selon la nouvelle Constitution, le rôle du président de la République est désormais honorifique, sans pouvoir effectif.

Une réforme constitutionnelle contestée

Cette transition institutionnelle ne fait pas l’unanimité. Plusieurs figures de l’opposition, dont Jean Pierre Fabre (ANC) et Me Paul Dodzi Apevon (FDR), ont boycotté la séance parlementaire. La Dynamique pour la Majorité du Peuple (DMP), qui regroupe des partis politiques et organisations de la société civile, a dénoncé un « crime commis contre le peuple togolais ».

Dans une déclaration lue en conférence de presse, la DMP accuse les parlementaires et la Cour constitutionnelle d’avoir validé « un président du Conseil des ministres tout-puissant bien que non élu par le peuple » et un président de la République choisi « à la place du peuple souverain ». La coalition appelle les citoyens à la résistance, en s’appuyant sur l’article 150 de la Constitution de 1992, toujours revendiquée par une partie de l’opposition.

Brigitte Kafui Adjamagbo Johnson, présidente de la DMP, a invité les Togolais à rejoindre massivement la manifestation prévue ce dimanche 4 mai à Lomé, organisée par l’ANC et les FDR.

Pour sa part, Nathaniel Olympio, président du Parti des Togolais et porte-parole du mouvement « Touche pas à ma Constitution », a qualifié cette journée de « triste » pour la nation. Selon lui, le chef de l’État a imposé une réforme contestée, ouvrant une période de « grande incertitude » marquée par une dualité constitutionnelle entre celle de 1992, plébiscitée par référendum, et celle de 2024, adoptée sans consultation populaire.

Le Togo entre ainsi dans une nouvelle ère politique, sous la domination renouvelée de Faure Gnassingbé, mais dans un climat de tension politique grandissante.

 

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