Guinée : le procès en appel d’Aliou Bah renvoyé au 16 avril prochain

Le procès en appel d’Aliou Bah, président du Mouvement Démocratique Libéral (MoDeL), s’est poursuivi ce mercredi 9 avril 2025 à la Cour d’appel de Conakry, dans une atmosphère tendue et sous haute surveillance. Reconnu coupable en première instance d’« offense et diffamation contre le chef de l’État par le biais d’un système informatique », l’opposant conteste sa condamnation à deux ans de prison ferme. La défense espère obtenir sa relaxe, dénonçant une procédure jugée arbitraire.

Audience dominée par un débat de procédure

L’audience du jour n’a pas permis d’entrer dans le fond du dossier. Elle a essentiellement été marquée par un affrontement entre le ministère public et la défense autour de la question du huis clos. Le parquet général a sollicité une tenue à huis clos de l’audience, arguant de la nécessité de préserver la sérénité des débats et d’éviter tout risque de trouble à l’ordre public. En face, les avocats d’Aliou Bah ont dénoncé une volonté de cacher le déroulement du procès au public, réclamant au contraire sa médiatisation pour garantir la transparence.

La Cour a tranché en rejetant les deux requêtes : ni huis clos, ni dispositif spécial de couverture médiatique. Le procès reste public, mais sans médiatisation exceptionnelle. À l’issue de ce débat procédural, la Cour d’appel a décidé de renvoyer l’affaire au 16 avril prochain pour la suite des audiences.

Aliou Bah clame son innocence

Aliou Bah est poursuivi pour des propos tenus en ligne à l’encontre du chef de la junte, le général Mamadi Doumbouya. L’accusation le soupçonne d’avoir diffamé et outragé le président de la transition à travers des publications sur les réseaux sociaux. En première instance, le tribunal de Kaloum l’avait jugé coupable et condamné à deux ans de prison ferme. Depuis le 7 janvier, il est détenu à la maison centrale de Conakry.

Lors de sa première comparution devant la Cour d’appel, le 26 mars dernier, le président du MoDeL a une nouvelle fois nié toute infraction. Il a affirmé avoir agi en homme politique libre, exprimant ses opinions sur la situation du pays. Il a réfuté toute intention d’outrage et estimé que rien ne justifie sa condamnation. « Je ne regrette rien de ce que j’ai dit pour mon pays », a-t-il déclaré, appelant les juges à le rétablir dans ses droits.

La défense dénonce une procédure politique

Les avocats de l’opposant guinéen pointent plusieurs irrégularités dans le procès. Selon eux, le jugement de première instance a violé les droits fondamentaux de leur client et repose sur une qualification pénale inappropriée. Ils dénoncent également une peine disproportionnée et estiment que la justice a été instrumentalisée pour faire taire une voix critique.

La défense a, par ailleurs, saisi la Cour de justice de la CEDEAO pour dénoncer les atteintes aux droits de l’opposant. Elle espère que cette démarche permettra d’exercer une pression supplémentaire sur les autorités guinéennes et d’obtenir un procès équitable.

Le parquet maintient les accusations

Pour le ministère public, les poursuites sont légales et justifiées. Bien que le chef de l’État ne se soit pas constitué partie civile, le parquet considère qu’il est dans son droit de protéger l’honneur du président à travers l’action publique. Le procureur soutient que les propos d’Aliou Bah ont gravement porté atteinte à l’image de l’institution présidentielle et doivent être sanctionnés conformément à la loi.

La demande de huis clos s’inscrivait selon lui dans une volonté de préserver le bon déroulement du procès, dans un contexte jugé sensible.

Une affaire au fort retentissement politique

Ce procès intervient dans un climat politique particulièrement tendu. Depuis la prise du pouvoir par le CNRD en 2021, les voix critiques du régime militaire sont de plus en plus visées. La condamnation d’Aliou Bah en janvier dernier avait suscité une vague d’indignation, notamment au sein de la société civile et de la classe politique d’opposition. Des organisations de défense des droits humains ont dénoncé une atteinte grave à la liberté d’expression.

Des diplomates occidentaux ont assisté à l’audience du 26 mars, signe de l’attention particulière que suscite cette affaire sur la scène internationale. Le sort du leader du MoDeL est désormais perçu comme un test pour l’indépendance de la justice guinéenne et le respect des engagements de la transition en matière de droits fondamentaux.

Prochaine audience décisive

Aliou Bah devra attendre le 16 avril pour connaître la suite de son procès. La défense entend y exposer de nouveau ses arguments et réclamer la relaxe pure et simple de son client. De son côté, le parquet pourrait plaider pour la confirmation de la peine, voire une sanction renforcée.

À l’intérieur comme à l’extérieur du pays, tous les regards restent tournés vers cette affaire hautement symbolique, qui cristallise les tensions entre la transition militaire et les forces politiques civiles. Le verdict final pourrait bien marquer un tournant dans le rapport entre pouvoir et opposition en Guinée.

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